Presse
Jaquette Brecht

Brecht

  • magazine : Europe
  • numero : 133 - 1957
  • date : 01 janvier 1957
  • catégorie : Culture & arts

Sommaire

  • Renier le passé ou préparer l’avenir?

    Les pages qui suivent offrent une moisson de textes et d'images qu'Europe est fière d'avoir pu rassembler en hommage au grand dramaturge disparu le 14 août 1956. Dans notre numéro d'août-septembre, où nous communiquions la nouvelle brutalement survenue, je prenais l'engagement envers nos lecteurs et envers sa veuve, la grande artiste Hélène Weigel-Brecht, aujourd'hui à son tour disparue, de publier un numéro spécial. Le voici.

    par Pierre Abraham
  • Ecrit à l’occasion de la mort de Bertolt Brecht

    Ce poète qui avait des richesses à revendre a jeté dans
    tout ce qu'il créait les germes de pensées et d'intuitions
    qu'il jugeait destinés à lever et à s'épanouir après sa mort. Il était convaincu que toute oeuvre vivante tire de sa propre force de quoi grandir et se prolonger, qu'elle se
    modifie avec chaque spectateur ou lecteur qui vient à
    elle et qu'elle atteint. Ses pièces sont bâties sur cette
    présupposition, de sorte que seul l'avenir pourra mesurer
    l'ampleur et la richesse de sa création.

    par Lion Feuchtwanger
  • B.B

    Fin mai dernier, à Berlin, j'étais assis avec Hélène Weigel et sa fille dans le minuscule jardin de leur maison.
    Le soir tombait sur l'unique grand arbre, en faisant taire
    ses oiseaux, et sur le cimetière voisin — le vieux cimetière huguenot où est enterré Hegel. J'arrivais de Paris et apportais à Brecht, en guise d'offrande, un fromage de chèvre et un roman policier.
    — Brecht sera très content, dit Hélène Weigel. Qu'elle
    s'adressât à son mari ou parlât de lui, elle l'appelait
    Brecht.

    par Vladimir Pozner
  • Brecht en privé

    Il m'est difficile d'écrire au passé sur un homme qui était
    si débordant de vie, qui semblait même presque vivre dans
    l'avenir et dont la pensée se situait délibérément dans cet
    avenir: Brecht. Il m'est plus difficile encore d'envisager avec toute la gravité qu'inspire la mort le coup terrible qu'est la nouvelle de son décès. Car chaque fois que je pense à Brecht, c'est avec le sourire.

    par Hans Winge
  • Théâtre épique ou dramatique

    Ce style « épique » que Brecht propose à la scène et qu'il met en discussion sur les plans à la fois théorique et pratique, est un sujet de fréquents malentendus. Disons d'abord qu'il ne s'agit nullement d'expériences arbitraires sur des formes et des styles nouveaux. Au contraire Brecht renoue avec des
    réflexions aussi vieilles que les différentes formes d'art elles-mêmes et dont il s'agit de préciser le rapport réciproque. Depuis qu'il existe un art épique et un art dramatique, les différences entre eux ont été sujet de méditation. A mesure que les catégories esthétiques étaient délimitées avec plus de précision on s'apercevait que toute séparation mécanique de ces deux genres n'aboutissait qu'à leur réciproque appauvrissement
    : au contraire l'interaction dialectique d'éléments
    dramatiques et épiques enrichit à la fois le drame et l'épopée.

    par Paul Rilla
  • Chemin du jeune Brecht

    Parler de Brecht, c'est parler de ses oeuvres. D'abord par
    nécessité. Brecht ne s'est jamais complu aux déclarations
    autobiographiques. Et même celles de ses oeuvres lyriques qui, apparemment, sont le plus personnelles, on doit se garder de vouloir les interpréter uniquement de ce seul point de vue. Telle la célèbre « Ballade du pauvre B.B. »

    par Gilbert Badia
  • “Ainsi va le monde et il ne va pas bien”

    Brecht est devenu un grand écrivain pour n'avoir jamais
    cru à l'innocence de l'écrivain. Il n'est pas permis à la poésie d'aujourd'hui de se limiter à des sujets « anodins ». Même les « Berceuses », les « Chansons Enfantines », les Elégies de Brecht ne sont pas anodines : ce sont des avertissements, des mises en garde, des supplications, des exhortations.

    par Lotte H. Eisner
  • L’Opéra de Quat’sous, la fable et son succès

    Brecht, joué avec succès en Scandinavie et en Angleterre — et aussi, pendant la guerre, aux U. S. A. — le fut également en Italie. La meilleure scène italienne et l'une des plus remarquables d'Europe, le Piccolo Teatro de Milan, avait invité au début de cette année le Berliner Ensemble ; la mort de Brecht ne permit pas de donner suite à cette invitation ; mais le Piccolo
    Teatro joue en ce moment à Berlin-Est ; et il a monté chez lui l'Opéra de Quatre Sous dans une mise en scène nouvelle. On retiendra entre autres choses, de cet article d'un critique italien la mention des modifications apportées par Brecht à son oeuvre de jeunesse, à l'usage des hommes de 19o6; elles vont dans le même sens — le dépassement de l'anarchisme — que celles qu'il introduisit dans le Procès de Lucullus, dont le pacifisme radical excluait la guerre défensive, la guerre de libération.

    par Arturo Lazzari
  • Commentaires de quelques poèmes de Brecht

    Walter Benjamin, dont on vient de publier en Allemagne
    de l"Ouest, en 2 v., les oeuvres complètes — critique littéraire et philosophie de l'histoire —, s'est donné la mort en 1940, aux pieds des Pyrénées, alors qu'il tentait d'échapper aux émissaires nazis qui le poursuivaient — pour ses origines juives et ses opinions progressistes. Il est reconnu aujourd'hui comme l'un des plus brillants et des plus profonds essayistes allemands
    du siècle (des textes de lui ont été publiés déjà par Les Temps Modernes.) Ami de toujours de Bertolt Brecht, dont il accompagna les débuts de ses pertinentes critiques, il dégage ici avec maîtrise quelques-unes des lignes de force de son univers poétique — de la confession personnelle à Vanti-fascisme militant en passant par l'humanisme simple et direct des « Poèmes pour enfants ». Le texte, recueilli dans ses OEuvres, a paru également dans un récent numéro de la revue «Nouvelle Littérature Allemande» (paraissant à Berlin-Est), auquel nous l'empruntons.

    par Walter Benjamin
  • Proses de Brecht sur l’art dramatique

    L'Opéra de Quat'Sous est un tableau de la société bourgeoise, et non du sous-prolétariat. Cette société bourgeoise a produit pour ses besoins une vision du monde bien précise, sans laquelle elle ne survivrait pas. Le surgissement du messager du roi est, là où la bourgeoisie voit représenté son monde, absolument nécessaire. Monsieur Peachum, qui exploite financièrement la mauvaise conscience de la société, est de cet avis. Thème de réflexion pour praticiens de théâtre : pourquoi il n'est rien de plus stupide que de supprimer le cheval du messager, comme le font presque tous les metteurs en scène « modernistes » de l'Opéra de Quat'Sous.

    par Bertolt Brecht

A propos du magazine

Europe
Europe La revue EUROPE a été fondée par Romain Rolland René Arcos, l'un de ses premiers animateurs parmi lesquels on compte Jean Guéhenno et Jean Cassou, expliquait ainsi le choix du titre : "Nous disons aujourd'hui Europe parce que notre vaste presqu'île, entre l'Orient et le Nouveau Monde, est le carrefour où se rejoignent les civilisations. Mais c'est à tous les peuples que nous nous adressons [...] dans l'espoir d'aider à dissiper les tragiques malentendus qui divisent actuellement les hommes". Jusqu'en 1939 où elle est suspendue à l'annonce de la signature du Pacte germano-soviétique, elle suit la route des communistes dans le combat anti-fasciste. À partir des années cinquante, Europe paraît sous la forme de numéros spéciaux et devient une revue littéraire de référence. La revue Europe a publié les textes d'auteurs aussi divers que Aragon, Jean-Richard Bloch, Céline, Emile Danoën, Jean Giono, Panaït Istrati, Tagore, Tristan Tzara...

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