Le sport
- magazine : Pouvoirs
- numero : 61 - 1992
- date : 01 juin 1992
- catégorie : Monde & société
Sommaire
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L’onde de choc du sport moderne
Dans le sport, la science, longtemps, ne s'intéressa qu'au corps, réduit à ses muscles, à sa chimie, à ses réflexes. Et bouda l'essentiel : l'avènement d'une pratique sociale nouvelle où se lisait rien moins que la modernité et ses figures successives voire contradictoires. Comme si le sport avait peu à dire sur l'évolution des sociétés, sur les raisons et les façons qu'ont les hommes de vivre ensemble, de rêver ensemble, de ménager aussi dans l'histoire
commune une place aux aventures singulières. -
De Coubertin à Samaranch : la diplomatie du CIO
Il peut sembler à première vue quelque peu rapide, voire inexact de parler de diplomatie à propos du Comité international olympique dont le statut n'a rien de commun avec celui d'un Etat et qui fait de
la séparation entre le sport et la politique un de ses principes de base. Cependant, l'institution olympique manifeste incontestablement la volonté de se comporter en Etat dans son domaine de compétence comme l'atteste par exemple la règle 23 de la Charte du Comité international olympique (CIO), intitulée « Autorité suprême » : « Le CIO est un arbitre, en dernier ressort, de toutes les questions concernant les Jeux et le mouvement olympique. En toutes matières, y compris la matière disciplinaire, à l'égard de tous et pour toutes les sanctions définitives ou temporaires (...), les pouvoirs du CIO sont souverains»,
A sa manière, il réclame l'autonomie, la plénitude et l'exclusivité des compétences, pour ne pas dire le monopole de la violence légitime, dans l'empire olympique. -
Sport et Etat
Le 14 décembre 1991 tous les journaux télévisés du soir s'ouvrent sur l'arrivée de la flamme olympique à Paris et sa réception par les plus hautes autorités de l'Etat. Depuis, pour le frisson d'un instant de participation au sacré, des millions de spectateurs se massent sur le parcours de la flamme gagnant Albertville.
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Sport et nationalisme
Dès 776 avant Jésus-Christ, les premiers Jeux olympiques subliment une nation. Seuls les athlètes de père grec avaient le droit de participer. D'abord limités au Péloponnèse, les Jeux, dès la quarantième Olympiade, furent ouverts à l'ensemble des citoyens de la Grande Grèce, mais toujours sous la même condition de filiation. Nationalisme ? Patriotisme ? Plutôt le second car il s'agissait de l'exaltation des valeurs, d'une culture, propres à un même peuple
vivant sur le même sol. -
Le ministère de la jeunesse et des sports
« Préposé à l'espérance » selon la formule de Pierre Mendès-France qui dut, en 1955, renoncer à créer un tel département ministériel devant l'opposition résolue du mouvement associatif, le ministère de la jeunesse et des sports est plutôt le carrefour des
contradictions. -
Le pouvoir fédéral
Le sport doit son essor au pouvoir fédéral. Passés les premiers temps de l'empirisme et une fois les pratiquants regroupés en clubs, il était logique que ceux-ci se rassemblent en fédérations nationales, elles-mêmes constituant à leur tour, entre elles, des fédérations internationales : par définition, la compétition sportive ne peut se passer ni d'une réglementation, ni d'une organisation systématique définissant, à tous les niveaux et sur les mêmes bases, un ensemble de
confrontations d'où puisse se dégager l'élite. Fondamentalement, le pouvoir fédéral est ainsi, tout à la fois, le promoteur et le gardien d'un
véritable « ordre sportif » dont l'autorité se fonde sur le volontariat de ceux qui s'y soumettent. -
Sport et collectivités locales
Le sport est porteur de valeurs essentielles pour la cohésion de la communauté nationale : égalité, solidarité, intégration, épanouissement de chacun. Son développement mérite donc un effort commun des responsables politiques à tous les échelons, afin de répondre aux besoins nouveaux exprimés par nos concitoyens. En vingt ans, le nombre des licences attribuées par le mouvement sportif est passé de 4 à 12 millions. Mais on estime que notre pays compte 22 millions de pratiquants et 1 million de dirigeants bénévoles. Les activités sportives représentent aujourd'hui, en France, 250 000 emplois.
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Sport et argent : le football
« La révolution en France, rien de plus facile, vous supprimez le football à la télévision et les gens descendent dans la rue ! » La formule du cinéaste Jean-Luc Godard est réaliste. En effet, qui échappe
en cette fin de siècle à l'incessant tourbillon d'images, d'exploits et de commentaires sur ce sport ? Spectacle populaire et universel, le football se prête fort bien à la dramaturgie du petit écran. -
Sur les terrains du sport et du pouvoir : rugby
Pour les pratiquants, les supporters et ceux qui les entourent, le rugby à l'évidence est « une famille ». Dans l'expression tout est dit. Tout y est du non-dit, car représentation. Qu'il séduise ou qu'il irrite, le rugby laisse peu indifférent. L'identité qu'il procure est forte. Quelle est donc l'origine du caractère abrupt des sentiments à son endroit ? Serait-elle dans la nature du jeu, comme aiment à le croire bien des thuriféraires ? Ou simplement repose-t-elle sur la structure paradoxale de ce qu'il procède à la fois du jeu et du sport, du terrain et du monde ?
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Aspects sociopsychologiques de l’hooliganisme : une vision criminologique
A la suite de la soirée dramatique du mois de mai 1985 au Heysel, une enquête visant le phénomène de la violence dans le football est menée par une équipe de jeunes criminologues de l'Université
cathohque flamande de Louvain, sous la direction du Pr L. Walgrave. Cette recherche est financée principalement par le ministre de l'intérieur, mais aussi partiellement par la Fondation Roi-Baudouin et le Conseil supérieur de Prévention de la Criminalité. Le but principal de la recherche est de mieux cerner les arrière-plans
des jeunes qui, chaque semaine, créent des difficultés dans les environs des stades de football. De cette façon, l'autorité belge tente de
bâtir une infrastructure scientifique de lutte sur trois plans : la prévention (surtout par la prévention sociale), la maîtrise du phénomène (surtout par un service d'ordre précis) et la répression (qui doit encore être élaboré). -
Les avatars contemporains de la démocratie
Si l'on fixait, arbitrairement bien sûr, à l'Antiquité grecque l'Agora et la République d'Aristote le point de départ de l'histoire de la démocratie, et que l'on cherche à discerner sur cette longue ligne séculaire les temps les plus forts de son développement, on retiendrait sans doute deux étapes.