Numéro 101
- magazine : Brèves
- numero : 101 - 2013
- date : 15 avril 2013
- catégorie : Culture & arts
Sommaire
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L’usine à gaz
En prenant le train ce matin-là à la Gare Saint-Lazare pour me rendre en banlieue nord-ouest, je ne sais d'ailleurs plus précisément dans quelle ville, je suis bien obligé d'avouer que oui, j'y avais pensé.
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Les ficelles
Souvent, il faut attendre que montent du fond des gorges les premières brumes. C'est signe que la date approche. Alors, comme s'il s'agissait de déposer son fardeau après une longue route, les braves gens s'imaginent pouvoir lâcher ce qu'ils ont sur le cœur et parler d'Alexandre.
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Tournée générale
Le soir je travaille dans un café sur le boulevard. C'est temporaire. L'ambiance fait fin de carnaval, avec la télé fixée au-dessus de la porte des chiottes, toujours ouverte et une brochette de spécimens qu'on trouve dans les troquets de boulevard.
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Du sable dans les yeux
Je me suis jamais très bien entendu avec mon père. Il entend pas ce que je lui dis pas, et j'entends pas ce qu'il me dit. En revanche, tout ce qu'il ne dit pas, tout ce qu'il croit que personne peut voir, moi je le vois, je l'entends.
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Balade en forme de requiem
Ç'a commencé comme ça. Une fille dans un bar devant un verre de bière, qui fredonne la chanson qui passe à la radio. "Mélodie Nelson", la voix de Gainsbourg et le partie de basse électrique pour l'ambiance.
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Les Toiles filantes
A peine Antonin avait-il terminé sa phrase que son père se leva de sa chaise en posant une main anxieuse sur son thorax.
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La Tour infernale
Charles a la chance d'avoir un bureau bien exposé. L'entreprise qui l'emploie loue son siège au 37e étage de la tour, côté ouest. Il est déjà presque trois heures et l'employé n'a fait qu'une courte pause déjeuner.
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Passation de pouvoir
L'escadron roule à toute allure. Les dizaines de chevaux ronflent nerveusement, faisant résonner les carlingues au rythme des explosions. Une trentaine de motards, à cheval sur leurs engins métalliques encadre le convoi officiel.
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Jouer au jardin
Alors Eve nommait les animaux, les plantes : la punaise fut puce (et vice versa), le frelon tout à tout hanneton et cafard, le pin fougère et vigne le lilas. Appellations incontrôlées ; les vivants s'ébrouaient, indécis. Les oukases de langue pleuvaient, s'annulant les uns les autres. Tu es oursin, je te baptise crabe, sois content.
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Partir
Je passe de la chambre d'hôtel à la terrasse. Je m'assieds sur la chaise blanche en plastique, ma chaise où je me suis assis tout le séjour, où je m'assieds chaque été que je viens dans cet hôtel.
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Tante Hilda
Je suis passée au cimetière de Romantain, aujourd'hui. Nous avions prévu une petite promenade dans la région avec Jérôme. Je lui ai dit que ma grande tante Hilda y était enterrée et il m'a gentiment proposé d'y passer.
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Les toiles cirées
La première, fixée à même la table. Lisse, nette, sans le moindre faux pli. Dessous, sur tout le tour, un rang serré de beaux clous ronds, dits tapissiers par les hommes de l'art : dans mes quatre ou six ans, des siècles de ravissement sous leur rectangle magique, reine dans son palais ou bien pauvre mendiante dans sa chaumière.
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L’impssible histoire de l’âne
Quand je suis triste, spleen, la pluie qui tombe, les feuilles et les années qui s'envolent, copains perdus ou tombés en route, fleurs au cimetière, le monde qui crève, arbres abattus, digitales perdues, écrans et lumières grises, quand je suis triste, pour rire un moment ou rêver un peu il 'arrive de penser à l'âne de Bâillon.
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En apnée
Durant l'essentiel de ma vie, il m'a fallu plonger. Pas le choix. Enfin si, j'aurais pu m'y refuser, comme l'ont fait certains de mes concitoyens, mais contrairement à eux, je n'aime pas vivre aux crochets des autres. Oh, ils nous encourageaient, ceux-là, les paresseux ! Allez-y, les bleus, prenez la rampe de lancement et hop !