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Jaquette Spectacle 82

Spectacle 82

  • magazine : Esse
  • numero : 82 - 2014
  • date : 10 septembre 2014
  • catégorie : Culture & arts

Sommaire

  • Le spectacle, la communication et la fin de l’art

    Dans ses écrits à propos de la « rumeur » persistante de la « fin de l’art »
    dans le contexte de l’art et de la philosophie modernes depuis Hegel,
    Eva Geulen souligne la perpétuelle non-actualité de cette idée : « Dès
    lors qu’il est question d’une fin... ce qu’on en dit est soit prématuré, soit
    décalé... Car la fin a déjà eu lieu ou elle est encore à venir. Entretemps,
    l’échéance de la fin avance ou recule, et les délibérations à ce propos se
    poursuivent. » Cette dualité est essentielle pour comprendre la place
    de l’art dans la critique du spectacle formulée par Guy Debord : pour les
    situationnistes, l’art est à la fois déjà chose du passé et en manque d’une
    fin ponctuelle et authentique.

    par Trevor Stark
  • Girls, girls, girls

    Pas une chose n’est une seule chose, seulement simultanément
    Une motocyclette vrombit et ma mère est quelque part
    Il est six heures du matin et il est trois heures du matin
    Qu’est-ce que vous faites simultanément ?

    par Jen Kennedy
  • Hennessy Youngman, et la nouvelle critique d’art

    Hennessy Youngman, alias « The Pharaoh Hennessy » (le pharaon
    Hennessy), alias « The Pedagogic Pimp » (le maquereau pédagogue),
    comme il se fait appeler, profère sur son canal YouTube des critiques
    à propos de la situation actuelle de l’art en employant la langue de la
    rue, argot urbain aux inflexions trainantes. Même si ces capsules vidéos
    sont devenues « virales », la célébrité et la notoriété de Youngman ne se
    limitent certainement pas au monde de l’art. Sa série vidéo Art Thoughtz
    fait sensation en ligne et s’est attiré jusqu’ici plus de 1 350 000 visiteurs
    et 11 500 loyaux abonnés. Il n’est pas étonnant, par conséquent,
    que Youngman soit l’un des critiques d’art qui aient connu de mémoire
    récente la plus grande popularité auprès de l’auditoire. Ainsi, un changement d’envergure est en train de s’opérer, où de nouvelles formes de critique d’art sont générées par les médias en ligne à contenu produit
    par les utilisateurs.

    par Matthew Ryan Smith
  • La spectacularisation dans l’art autochtone

    Dans le documentaire canadien Reel Injun (2009), le cinéaste innu André
    Dudemaine déclare : « Je crois que le cinéma a été inventé pour filmer les
    Premières Nations. » Ce qui pourrait être pris pour une boutade est, d’un
    point de vue historique, parfaitement exact. En septembre 1894, W.K.L.
    Dickson tourne, à l’aide d’un kinétographe, Sioux Ghost Dance, Buffalo
    Dance et Indian War Council, les tout premiers films de l’histoire du cinéma, et ceux-ci mettent en scène des Sioux Lakotas ; en 1914, le photographe Edward S. Curtis se lance dans la réalisation du premier long métrage de fiction, In the Land of the Head Hunters, une grande fresque cinématographique de 65 minutes se déroulant chez les Kwakwaka’wakw d’avant le premier contact ; en 1922, Robert Flaherty réalise Nanook of the North, le premier documentaire de l’histoire du cinéma, qui entend restituer la vie d’un Inuit et de sa famille dans la région de la baie d’Hudson. Ce que montrent ces films des premiers temps du cinéma, c’est le fait que les Autochtones ne sont pas seulement un sujet de prédilection pour les spectacles, mais qu’ils génèrent leur propre forme de spectacularisation. Loin d’être une nouveauté, ce fait date des premiers voyages de Christophe Colomb, lequel ramena en Europe des Arawaks des Bahamas pour les montrer à la cour d’Espagne. Dès le 16e siècle, les Amérindiens sont ainsi exhibés en Europe dans des défilés, des cortèges, des tableaux vivants. Cette spectacularisation des Autochtones ne fera que s’intensifier avec les dispositifs de masse qui se mettent en place au cours
    du 19e siècle aux États-Unis et en Europe, et dont les deux exemples les
    plus connus sont l’Indian Gallery de George Catlin et le Wild West Show
    de Buffalo Bill.

    par Jean-Philippe Uzel
  • L’épuisement du spectaculaire chez Nicolas Boone

    Peut-on faire de l’art après avoir lu Guy Debord ? Le diagnostic de la
    culture noyée dans « la contemplation spectaculaire » et d’un art qui,
    s’il ne veut pas perdre son âme, doit organiser sa propre « dissolution »
    et son propre « dépassement » dans la politique ressemble en effet à une
    impasse. En 2000, les commissaires de l’exposition Au-delà du spectacle
    ont proposé de la contourner en invoquant la conception plus hédoniste,
    partagée par des générations de penseurs, du monde comme théâtre.
    Ils limitaient ainsi la portée de la thèse debordienne en rappelant à quel
    point la culpabilité d’aimer le divertissement qu’elle communique est
    moralisatrice. Mais leurs propos laissaient en suspens le problème de la
    récupération de l’art par le spectacle. Puis récemment, Hou Hanru, commissaire de la Biennale de Lyon de 2009 intitulée Le spectacle du quotidien, abordait la question plus frontalement en posant comme préalable « qu’il n’existe plus de “dehors” pour cette société du spectacle à l’âge de la globalisation », ce qui n’empêche pas selon lui une position artistique critique, sous la forme d’une « négociation subversive avec cette condition de “non-dehors” ». Mais le bel oxymore de cette expression (comment imaginer un subversif qui négocie ou inversement un négociateur subversif ?) ne renvoie-t-il pas à la figure du serpent qui se mord la queue ? Si bien que l’on revient au coeur du problème : l’art peut-il échapper à la société du spectacle ?

    par Vanessa Morisset
  • L’ombre des projecteurs dare-dare au quartier des spectacles

    En juin 2012, au plus fort des manifestations du Printemps érable, une
    dizaine d’individus portant un t-shirt identique s’assoient sur le bord
    du trottoir longeant la Brasserie T !, sur la Place des festivals, pour y
    manger un sandwich. À des techniciens de L’Équipe Spectra venus leur
    demander d’expliquer leur présence, l’un d’eux remet une carte où il est
    écrit : « L’utilisation de l’espace public est un privilège et non un droit. »
    S’ensuit une série d’appels téléphoniques inquiets entre L’Équipe Spectra
    et l’administration du Quartier des spectacles, qui rebondissent jusqu’à la
    roulotte de DARE-DARE, hôte de la performance : l’administration enjoint
    au centre de faire cesser immédiatement ces actions « politiques ». Avec
    le projet Secondes zones d’Anne-Marie Ouellet, les relations entre DAREDARE et son nouvel hôte, le Quartier des spectacles, s’amorcent sous le signe de la suspicion.

    par Edith Brunette
  • La manifestation interdite de l’art à l’oeuvre

    Janvier 2013. La galerie Espace Virtuel à Chicoutimi présente Bootleg du jeune artiste John Boyle-Singfield derrière des portes verrouillées. L’artiste présente une version piratée de l’exposition Hors Champ, qui l’a précédé dans la programmation, de manière à provoquer un effet faussé de déjà-vu. L’artiste a copié personnellement et par l’entremise d’une compagnie de Shenzhen l’ensemble des oeuvres de Janieta Eyre, Adad Hannah, Marisa Portolese et Marc Séguin exposées dans le cadre de Hors Champ.

    par Amber Berson
  • Habilitation au récit

    Depuis son exposition Final Girl, présentée à Plein sud en 2006, Natascha
    Niederstrass a démontré un intérêt constant pour les questions de narration en photographie. L’un des enjeux importants de cette production, constituée de prélèvements de photogrammes sur des longs métrages commerciaux, résidait dans le questionnement du récit. En prélevant un photogramme particulier dans la trame de chacun des films choisis, l’artiste figeait l’image sélectionnée, l’éternisait, pourrait-on dire, tout en lui conservant sa force narrative. De fait, la justesse de son choix se
    mesurait à la capacité du fragment prélevé à engendrer de possibles récits. Niederstrass invitait ainsi les spectateurs à se construire des scénarios leur permettant d’appréhender l’image qu’ils avaient sous les yeux. Cette approche ouvrait un vaste chantier dont ses oeuvres récentes, exposées chez Trois Points et Occurrence au cours de l’année 2014, soulignent toute la pertinence.

    par Pierre Rannou

A propos du magazine

Esse
Esse ESSE arts + opinions s’intéresse aux diverses pratiques disciplinaires et interdisciplinaires (arts visuels, performance, vidéo et cinéma d’auteur, musique et danse actuelles, théâtre expérimental, etc.) et à toutes formes d’interventions à caractère social, in situ ou performatif. La revue Esse privilégie les analyses qui abordent l’art en relation avec le contexte (géographique, social, politique ou économique) dans lequel il s’inscrit, les pratiques relationnelles, les œuvres engagées, les manifestations hors les murs. esse soutient aussi les discours d’artistes et d’auteurs qui prennent en compte les créations expérimentales ou risquées, remettant en question les valeurs dominantes. La revue se démarque par son engagement et sa volonté à tisser des liens entre la pratique artistique et son analyse. esse est présent au canada et en Europe.

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