Les pouvoirs africains
- magazine : Pouvoirs
- numero : 25 - 1983
- date : 01 juin 1983
- catégorie : Monde & société
Sommaire
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La spécificité des pouvoirs africains
Peut-on parler d'une spécificité des pouvoirs africains ? Avant de répondre à la question qui nous est ainsi posée, il importe, par certaines considérations d'ordre épistémologique et méthodologique, d'en préciser le sens et la portée. Nous espérons éviter ainsi certains pièges.
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Les sociétés africaines face à l’Etat
Comprendre que les sociétés africaines sont « comme les autres », penser leur banalité, saisir que leur spécificité est d'ordre strictement historique, voilà ce qu'un siècle d'« africanisme » officiel n'a guère facilité, quelle que soit la masse considérable de connaissances qu'il a rassemblées. L'image de l'Afrique qu'il a sécrétée est aussi ambiguë que celle de 1' « Orient » produite par 1' « orientalisme » et dénoncée par un Saïd ou un Rodinson. L'opinion publique occidentale est gorgée de stéréotypes qui, souvent, exhalent le racisme d'antan. L'aberration fondamentale revient sans doute à ériger une africanité mythique, archétype en lequel se résolveraient l'actualité événementielle, la configuration globale et le devenir des sociétés noires. Or, l'Afrique n'est précisément pas le continent des idées simples. Des rives de l'océan Atlantique à celles de l'océan Indien, la diversité triomphe : climatique, physique, humaine, politique, économique, historique. Le rappeler, c'est pressentir déjà que les « pouvoirs africains » ne se conjuguent pas au singulier et qu'ils ont noué avec leurs sociétés des rapports complexes que défigurent inévitablement les différentes vulgates monistes.
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Cultures, religions et idéologies
Les rapports des cultures, religions et idéologies avec les « Pouvoirs africains » sont d'une extrême diversité et complexité. L'Afrique contemporaine ou moderne, et c'est un truisme, est le produit du processus de conquête, de colonisation et décolonisation, avec son insertion imposée de l'extérieur (dépendance) dans le système international. Aux cultures, religions et idéologies africaines, toute société sécrétant les siennes, sont venues se superposer ou se juxtaposer des cultures, des religions et des idéologies étrangères qui, par le rapport des forces et par une volonté manifeste de domination, de nivellement et d'uniformisation, parce qu'elles s'estiment supérieures, être en l'occurrence l'archétype, visent à modeler les sociétés africaines.
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A propos des racines historiques du pouvoir : “Chefferie » et « Tribalisme ”
L'idée est de montrer à quel point le pouvoir est, en Afrique sub-saharienne, le résultat d'un processus de longue durée qui mêle de façon inextricable des éléments hérités de systèmes politiques successifs et en grande partie contradictoires schématiquement : précolonial, colonial et postcolonial ; d'où l'émergence, voire la dominance de phénomènes qu'il serait tout à fait erroné d'analyser aujourd'hui de façon statique, c'est-à-dire sans faire référence, de façon approfondie, à la diachronie.
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Esquisse d’une typologie des régimes politiques africains
Établir une typologie des régimes (ou des systèmes) politiques africains paraît une entreprise dépourvue de difficultés majeures, si on prend comme équivalents « régimes politiques » et « régimes constitutionnels », c'est-à-dire si on estime qu'un régime politique est celui-là même qui est décrit par la Constitution. Il suffirait d'analyser les textes pour classer dans l'herbier amoureusement élaboré par les constitutionnalistes, à partir des expériences vécues par les Etats dits développés, tel ou tel régime (voir ce type d'analyse dans l'Année africaine). Cependant, une telle approche s'avère décevante.
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Eléments de réflexion sur les partis politiques africains
La majorité des Etats d'Afrique noire vit sous le régime du parti unique. C'est le cas de la République de Djibouti et de la Côte d'Ivoire, du Malawi et de la Zambie, du Gabon et du Rwanda par exemple. Quelques Etats ont même totalement mis hors la loi les partis politiques. Une telle situation existe au Tchad, qui n'est pas encore sorti d'une guerre civile qui se prolonge depuis dix-huit ans, au Libéria, au Ghana et en Haute-Volta, où des putschs relativement récents sont à l'origine de cet état de fait.
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Les régimes militaires
Alors que la plupart des jeunes Etats africains avaient accédé à l'indépendance en 1960 et que les africanistes portaient leur attention sur la « présidentialisation » des nouveaux régimes et sur le rôle prépondérant des partis uniques, un phénomène nouveau allait remettre très rapidement en question l'interprétation des systèmes politiques de l'Afrique noire.
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L’administration
L'administration occupe, au sein des pouvoirs africains, une place singulière par son ampleur physique et vu l'abondance des controverses et des critiques empiriques, scientifiques et idéologiques qu'elle a suscitées. Lorsque René Dumont, déçu par les premières expériences des nouveaux Etats, écrit que l'administration est «la principale industrie des pays d'Afrique », il souligne, à sa manière, que la gestion des institutions publiques africaines est autant un indicateur du mode de fonctionnement des Etats africains qu'un produit de leurs déséquilibres structurels propres. Les sciences de l'administration (le droit administratif ou même la sociologie des organisations) sont impuissantes à rendre exclusivement compte d'un phénomène total qui est au cœur d'un réseau complexe de relations de pouvoir.
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Portrait du chef d’Etat
Dans les constitutions africaines le chef d'Etat apparaît comme la clé de voûte des institutions politiques. Cette qualification, qui résulte de l'analyse juridique, ne peut satisfaire le politiste. Elle ne peut rendre compte de la nature des relations entre le chef et son Etat, ni entre l'Etat et la société qu'il vise à encadrer. Qui
dit clé de voûte, dit ensemble construit. Or l'Etat en Afrique est un édifice inachevé. Il évoque plus l'échafaudage ou le décor qu'une cathédrale harmonieuse, ouverte à tout un peuple. L'image de la clé de voûte laisserait supposer aussi que le chef de l'Etat a un rôle essentiel mais passif. Or, en Afrique, il ne pourrait rester longtemps à la tête de son pays s'il ne faisait constamment preuve de dynamisme et d'esprit d'initiative. -
Quelles indépendances ?
A cette question le sottisier de certains titres récemment parus nous donne une réponse sans équivoque : « étranglée », « désenchantée », « déboussolée », « opprimée », « trahie », à la lumière de pareil martyrologe l'Afrique nous apparaît le plus souvent comme un continent à bout de souffle, victime des effets doublement pervers d'une « privilégiature » autochtone insensible aux besoins des masses
paysannes et d'un néo-colonialisme impénitent. Sans doute ce jugement contient-il une large part de vérité : presque toujours dérisoires dans leurs résultats économiques, illusoires sur le plan des promesses d'autonomie politique qu'elles suscitèrent, les indépendances africaines se sont soldées par de multiples échecs. -
L’informatique parlementaire en France
« A l'ère de l'ordinateur nous sommes, nous, à l'ère du boulier », constatait un député en 1969. Aujourd'hui, ce propos désabusé n'est plus d'actualité. L'informatique a franchi le seuil des assemblées, et tient dans le déroulement des travaux parlementaires une place de plus en plus importante. Il est désormais question d'informatique parlementaire. L'introduction de l'informatique dans le fonctionnement des assemblées s'est opérée par étapes, à partir de 1970.